vendredi 21 février 2014

Entrevue avec Jay Ryan

A lire, une interview révélée par Ztélé, de Jay Ryan : 

Si Jay Ryan n’est pas encore très connu de ce côté-ci de l’Atlantique, les choses risquent de changer, grâce à son rôle dans la nouvelle mouture de Beauty & the Beast. Alors que la série arrive sur  Ztélé, voici le compte-rendu d’une session de questions et réponses à laquelle l’acteur s’est prêté.

À l’instar de votre personnage dans Beauty & the Beast, vous considérez-vous comme un bel homme?

Jay Ryan : C’est drôle, les questions sur ma beauté reviennent souvent dans les médias, qui se demandent comment je peux interpréter la Bête avec une apparence physique qui ne correspond pas à l’idée que les gens s’en font. Ça me réjouit que ça ait provoqué une certaine controverse dès le départ. L’émission est principalement destinée à un public féminin. C’est un peu le Prince charmant à l’envers. Mon personnage ressemble à un homme ordinaire, mais il peut se transformer en horrible créature démoniaque, ce qui convient parfaitement à notre version moderne. Vous savez, les contes de fées existent aussi pour être revisités, pour qu’on les raconte différemment, et c’est ce que nous faisons.

Le personnage que vous interprétez, Vincent, est un homme grossier. À votre avis, pourquoi les femmes préfèrent-elles ce genre d’homme à ceux qui sont gentils?

Jay Ryan : Grossier? Ça n’a pas la même signification d’où je viens… Tu veux dire un vilain garçon? Ça oui. Vincent est renfermé, il garde ses émotions pour lui. Il ne met jamais cartes sur table, parce qu’il doit d’abord apprendre à faire confiance aux gens. C’est Catherine, le personnage joué par Kristin Kreuk, qui lui permettra de s’ouvrir. Je ne suis pas certain que Vincent soit un bad boy classique. Je pense qu’il possède beaucoup plus de profondeur que ça. On peut le percevoir de cette façon parce qu’il se trouve du mauvais côté de la loi, mais je ne le qualifierais pas de vilain garçon. Malgré ses difficultés à réintégrer la société, il ne souhaite être qu’un homme comme les autres. Certains aspects de sa propre personnalité le rebutent, notamment la nature violente de la Bête. Ça permet de parler de l’agressivité masculine, et de la manière dont les hommes vivent avec ça. L’émission aborde des thèmes profonds, mais ça demeure toujours divertissant.

En tant qu’acteur, comment vous transformez-vous physiquement et mentalement pour jouer la Bête?

Jay Ryan : Et bien, physiquement, au simple niveau cosmétique, ça prend quatre heures pour appliquer mon maquillage. Rassurez-vous, il faut plusieurs prothèses pour me transformer en créature hideuse! J’ai un torse de latex qui monte jusqu’au cou, huit prothèses différentes couvrant l’entièreté de mon visage, sans oublier les verres de contact, les fausses dents, et le poil. Je profite habituellement de ces quatre heures de maquillage pour piquer une sieste, parce que se faire enduire le visage de colle durant l’hiver à Toronto, ce n’est pas une partie de plaisir! La colle gèle instantanément dès qu’elle est appliquée! À mon réveil, je vois le reflet de la Bête dans le miroir, et ça me met directement dans la peau de mon personnage. J’ai surtout travaillé au théâtre, et comme acteur, je suis habitué à un jeu plus physique. À la télévision, on fait habituellement beaucoup de dialogue, mais j’ai la chance d’interpréter une créature plus théâtrale. Je me suis inspiré des animaux les plus féroces de la planète pour jouer la Bête, parce que dans notre version, l’ADN de Vincent est mélangé à celui d’animaux. C’est un rôle très physique, et à mesure que la série avance, cet aspect se révèle davantage. Lors des trois premiers épisodes, la Bête est toujours cachée, ou on voit son reflet flou à travers les yeux d’une Catherine en détresse, mais à mesure que l’intrigue progresse et que les auteurs ont appris à me faire confiance, on montre de plus en plus sa nature sauvage et farouche.

Contrairement au Vincent de l’histoire originale, le vôtre se transforme en Bête. C’est ce qui a fait dire à certains critiques que l’émission est plus proche de Hulk que de Beauty & the Beast. J’aimerais savoir ce que vous pensez de cette comparaison.

Jay Ryan : Je suis un fan de la série télé originale. Lorsque j’ai reçu le scénario du pilote, j’espérais que ça soit quelque chose de complètement différent. Pourquoi essayer de réparer un truc qui n’est pas brisé? Dès que j’ai appris que Vincent se transformait en Bête, qu’il n’était pas cette créature hideuse tout le temps, ça m’a donné le goût de jouer le rôle. De un parce que je n’avais pas à porter les prothèses en permanence, mais aussi parce qu’en tant que comédien, le personnage me donne accès à une très large palette d’émotions. Il est humain à l’extérieur, mais se transforme en Bête sous l’effet de sa chimie interne. Ça permet de jouer aux deux extrêmes, avec l’obscurité et la lumière, et si la série continue pendant sept saisons, ça me laisse un vaste registre avec lequel travailler.

J’apprécie aussi que cette version moderne prenne place dans une sorte de réalité augmentée. Ça rend l’histoire crédible, et c’est l’une des raisons pour lesquelles je voulais jouer Vincent. J’ai lu plusieurs livres qui traitent des vraies expériences menées sur des soldats et des animaux. Cette façon de mélanger la mythologie avec une dose de réalisme me fascine. Puisqu’on s’adresse à un jeune public, on scrute beaucoup la culture populaire pour voir ce qui est intéressant, ce qui retient l’attention. Je ne suis pas certain que les jeunes femmes apprécieraient autant la série si Vincent avait toujours la forme de la Bête. Je pense que c’est une bonne décision des créateurs de l’émission. Je sais que certains critiques écrivent que l’histoire n’est pas censée se passer comme ça, mais comme je le disais plus tôt, je pense que les contes de fées sont aussi là pour être dépoussiérés, et racontés différemment.

Vous avez surtout travaillé en Australie et en Nouvelle-Zélande. Comment avez-vous décroché le rôle principal dans une série américaine?

Jay Ryan : Quand est arrivé Beauty & the Beast, j’avais décidé de prendre une année sabbatique pour me consacrer à Top of the Lake de Jane Campion, une coproduction internationale de la BBC et de Sundance dans laquelle je venais de décrocher un rôle. Je voulais m’isoler un certain moment pour m’y préparer. Jane imaginait mon personnage avec un crâne à demi rasé; on m’a donc rasé la moitié de la tête, avant d’ajouter un énorme tatou qui me donnait un air féroce. Je jouais le fils d’un caïd de la drogue. C’est le grand acteur Peter Mullan qui interprétait mon père. Je me suis dit qu’avec un look pareil, personne aux États-Unis ne voudrait m’engager! Quand j’ai reçu le scénario du pilote, je ne savais pas trop quoi faire… Puis, j’ai pensé que, d’une certaine façon, j’avais l’air d’une bête.

Après avoir envoyé quelques vidéos d’audition, les producteurs ont fini par m’inviter à les rencontrer. J’ai pris l’avion avec la tête à moitié rasée. Sur place, je me suis servi des deux côtés différents de mon crâne pour faire une routine à la Jekyll et Hyde. J’ai eu l’impression qu’ils appréciaient ma performance, mais bon, la salle était remplie de producteurs exécutifs qui semblaient plus préoccupés par les questions de budget que par le reste. Je suis donc retourné chez moi pour travailler sur la pièce de Jane, mais à peine descendu de l’avion, j’ai reçu un appel me demandant de retourner aux États-Unis pour une lecture avec Kristin Kreuk, afin de voir comment la chimie opérait entre nous deux. Je suis littéralement remonté dans le même avion pour un autre dix-huit heures de vol! À mon arrivée, je souffrais tellement de décalage horaire que j’avais du mal à parler.

On m’a mis une grosse perruque sur la tête pour m’aider à me mettre dans la peau du personnage. J’avais l’air de sortir du film Braveheart la première fois que j’ai rencontré Kristin! Elle n’avait aucune idée de ma véritable apparence sous le maquillage et la perruque. Ça s’est très bien déroulé. Kristin était adorable, et très accommodante. Elle savait que je voulais vraiment décrocher le rôle. Elle a tout fait pour m’aider, et quelques semaines plus tard, j’ai obtenu l’emploi. Je pense que ce n’était pas un choix évident d’engager un acteur étranger et peu connu pour une émission américaine très médiatisée. Ils ont pris une chance avec moi, et c’est tant mieux! J’ai failli décrocher des rôles à plusieurs reprises dans le passé, mais quand on est un étranger qui ne possède pas de visa, ça diminue beaucoup les chances d’être embauché en bout de compte.

Vous dites que l’émission s’adresse à un jeune public, mais certains moments sont quand même assez sombres, spécialement les séquences en Afghanistan. Le fait que ça soit davantage qu’une série à l’eau de rose pour adolescentes vous a-t’il interpellé?

Jay Ryan : Oui, définitivement. La mythologie de l’émission m’a beaucoup interpellé, tout comme ce que je pouvais apporter au personnage. J’apprécie les éléments plus sombres de la série, qui prennent une texture de bande dessinée pour adultes. Vous savez, les jeunes d’aujourd’hui sont accoutumés aux thèmes plus sombres; ils apprécient les Batman de Christopher Nolan, ils jouent aux jeux vidéo… Notre projet se doit d’incorporer des éléments de cette culture, ce que Gary Fleder a admirablement bien réussi en réalisant le pilote. Il voulait emprunter le ton sombre et sans concession d’une bande dessinée. Je pense que les contes de fées ont toujours contenu une certaine dose de noirceur à travers leurs histoires. Ça permet de garder l’intérêt de l’adulte qui est en train d’en faire la lecture à son enfant. J’aime que le récit s’assombrisse à mesure qu’on en apprend davantage sur les origines de Vincent. On découvre la nature des expériences auxquelles il a été soumis, ou les gens qu’il a dû abandonner à New York, sa famille, ses amis, son ancienne fiancée. Ce sont des éléments très juteux pour un acteur.

Vous avez mentionné le public largement féminin de l’émission. Quel genre de contact avez-vous eu avec les fans jusqu’à maintenant, et sentez-vous une certaine responsabilité envers votre public?

Jay Ryan : Et bien, le réseau de télévision m’a obligé à ouvrir un compte Twitter. J’ai un peu peur des médias sociaux, j’ignore comment ça fonctionne. J’apprends à force d’essais et d’erreurs, mais depuis que j’ai joint Twitter, je me rends compte à quel point c’est fantastique d’être ainsi connecté à son public. C’est instantané, mais les gens s’attendent aussi à ce qu’on leur réponde immédiatement. C’est un peu comme avoir 20 000 personnes qui nécessitent votre attention toute la journée! Les scénaristes ont aussi ouvert des comptes Twitter, et ils demandent l’opinion de l’auditoire régulièrement. Plusieurs des commentaires qu’ils ont reçus ont déjà eu un impact sur l’émission, ce qui est assez incroyable. Donc, oui,  je sens une certaine responsabilité envers le public, mais je ne ressens pas trop de pression. J’ai encore l’impression de pouvoir vivre ma vie…


Je sais ce que le public veut voir à l’écran, et c’est la romance, qui se trouve au cœur de Beauty & the Beast. Je fais le maximum pour ne jamais négliger le côté romantique du personnage. Vincent n’utilise pas la technologie moderne. Il laisse des notes, ou lance des cailloux contre la fenêtre d’une personne pour attirer son attention. Je m’amuse beaucoup avec cette façon de courtiser « à l’ancienne », avec tous ces gestes démodés. Je pense que c’est le genre de choses qui risque de plaire à un jeune public. Même si on s’adresse aux jeunes, des hommes et des femmes âgés de plus de trente-cinq ans, qui adoraient l’émission originale, sont venus nous dire à quel point ils appréciaient notre version. C’est génial! Comme notre version est si différente de celle des années ’80, j’appréhendais un peu la réaction du public original. Si on s’était contenté de refaire celle des années ’80 plutôt que de l’adapter à l’époque moderne, je pense qu’on n’aurait eu aucune forme de crédibilité. Puisque l’émission originale est disponible en DVD, pourquoi la refaire alors?

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